mardi 19 mars 2013

Crédit à la consommation : charge de la preuve du bordereau de rétractation

Aux termes de l’article L311-15 ancien du Code de la consommation, applicable aux offres de prêts souscrites avant le 1er mai 2011, '' […] l’emprunteur peut, dans un délai de sept jours à compter de son acceptation de l’offre, revenir sur son engagement. Pour permettre l’exercice de cette faculté de rétractation, un formulaire détachable est joint à l’offre préalable. L’exercice par l’emprunteur de sa faculté de rétractation ne peut donner lieu à enregistrement sur un fichier '' ; l’inobservation de ces dispositions entraine la déchéance du droit aux intérêts du prêteur.
Souvent, le bordereau de rétractation figure uniquement sur l’exemplaire de l’offre destiné à l’emprunteur ; les banques se contentent d’insérer dans leur exemplaire la mention suivante : ''je reconnais rester en possession d'un exemplaire de cette offre doté d'un formulaire détachable de rétractation''.
Se pose alors la question de la charge d la preuve de la transmission effective du bordereau de rétractation à l’emprunteur.
Dans une séries d’arrêts rendus le 12 juillet 2012, notamment l’arrêt Crédipar[1], la 1ère chambre de la Cour de cassation avait approuvé la Cour d’appel de Poitiers d’avoir retenu, d'une part, que la formalité du double s'appliquait uniquement à l’offre préalable elle-même et non au formulaire détachable de rétractation qui y est joint, et d’autre part qu’il appartenait à l’emprunteur de justifier du caractère erroné ou mensonger de sa reconnaissance écrite en produisant l’exemplaire original de l’offre resté en sa possession.
Cette position de la Cour de cassation avait fait l’objet de vives critiques d’une partie de la doctrine qui lui reproche son caractère ambigu et susceptible de plusieurs critiques[2].
Dans arrêt en date du 16 janvier 2013[3], la même 1ère chambre de la Cour de cassation a confirmé sans aucune ambiguïté que ''la reconnaissance écrite, par l’emprunteur, dans le corps de l’offre préalable, de la remise d’un bordereau de rétractation détachable joint à cette offre laisse présumer la remise effective de celui-ci ; qu’ayant constaté que Mme X... avait souscrit une telle reconnaissance, la cour d’appel en a exactement déduit que, faute pour celle-ci de rapporter la preuve de l’absence de remise du bordereau ou, à défaut, de son caractère irrégulier, l’intéressée ne pouvait se prévaloir de la déchéance du droit aux intérêts du prêteur ''. Ceci dit, la Cour de cassation considère effectivement que la reconnaissance écrite de la remise par l’emprunteur de la remise d’un bordereau de rétractation détachable joint à l’offre de prêt opère un renversement de la charge de la preuve au profit du prêteur.
 


[1] Pourvoi n° 11-17.595
[2]Ghislain Poissonnier, « Bordereau de rétractation de l'offre préalable de crédit à la consommation : clarifications et incertitudes », note sous Civ. 1re, 12 juill. 2012, D, 2012, p. 2567
[3] Pourvoi n° 12-14.122

Crédit à la consommation : calcul du TEG et frais relatifs à l’assurance incendie

Dans un arrêt de la première chambre civile du 6 février 2013 (pourvoi n° :12-15722), la Cour de cassation affirme que les frais relatifs à l’assurance incendie ne sont intégrés dans la détermination du TEG que lorsque la souscription d’une telle assurance est imposée à l’emprunteur comme une condition de l’octroi du prêt, et non à titre d’obligation dont l’inexécution est sanctionnée par la déchéance du terme.
 
Le texte complet de cette décision peut être consulté en cliquant ici.

Contrat d'assurance et droit de rétractation


Le droit de rétractation, entendu comme une « manifestation de volonté contraire par laquelle l’auteur d’un acte ou d’une manifestation unilatérale de volonté entend revenir sur sa volonté et la retirer comme si elle était non avenue, afin de la priver de tout effet passé ou à venir » (Vocabulaire juridique de Gérard CORNU), constitue l’un des aspects les plus importants de la protection du consentement. Il s’agit d’un droit octroyé dans des situations où l’on présume que le consentement de l’une des parties ne présente pas les garanties suffisantes d’un consentement informé, libre et réfléchi. Ces situations peuvent être différentes et les raisons très variables.

En matière de contrat conclu à distance, le droit de rétractation permet au consommateur de corriger ses erreurs d’appréciation commises lors de la commande, ce dernier « n'[ayant] pas la possibilité in concreto de voir le produit ou de prendre connaissance des caractéristiques du service avant la conclusion du contrat » (14ème considérant de la directive communautaire 97/7).

S’agissant des contrats ne portant pas sur des services financiers, le délai de rétractation est actuellement de sept jours francs (article L.121-20 du Code de la consommation).

Pour ce qui est des contrats portant sur des services financiers, le délai est de quatorze jours ; des exceptions sont néanmoins prévues, c’est le cas par exemple du contrat d’assurance conclu à distance.

Aux termes de l’article L.112-2-1, II, 3, c, du Code des assurances, le droit de rétractation ne s’applique pas « aux contrats exécutés intégralement par les deux parties à la demande expresse du consommateur avant que ce dernier n'exerce son droit de renonciation ».

Dans un arrêt en date du 17 janvier 2013 (n°11-20155), la 2ème chambre civile de la Cour de cassation a eu l’occasion de se prononcer sur la notion de d’exécution intégrale du contrat d’assurance.

Les faits sont les suivants :

Un consommateur avait souscrit à distance, par téléphone, un forfait de diffusion d'une annonce pour la vente de son véhicule et adhéré simultanément à une assurance dit « garantie mécanique », assurance couvrant les coûts de réparation du véhicule en cas d'avarie mécanique. La garantie avait pris effet immédiatement, à la demande de l’assuré, lequel avait aussitôt procédé téléphoniquement au règlement, par carte bancaire, de la prime d’assurance. Par la suite, dans le délai légal de quatorze jours, l’assuré informait l’assureur qu’il renonçait au bénéfice du contrat, réclamant le remboursement de la prime versée. L’assureur lui avait opposé une fin de non-recevoir au motif que le contrat était intégralement exécuté, à la demande expresse du consommateur, ce qui excluait la possibilité de rétractation.

L’assuré avait alors assigné la société d’assurance en remboursement du montant de la prime. Débouté de ses demandes par le juge de proximité, l’assureur avait formé un pourvoi en cassation.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi, estimant que le paiement de la prime ne suffit pas à établir l'exécution intégrale du contrat d'assurance à la demande expresse de l'assuré. En d’autres termes, le paiement de la prime marque seulement la prise d’effet du contrat et non son exécution intégrale. « Seule la survenance d’un sinistre obligeant l’assureur à exécuter son obligation de règlement de l’indemnité (ou du capital promis) serait donc de nature, lorsqu’elle survient avant l’écoulement du délai de 14 jours, à priver le souscripteur de son droit de renoncer à la police souscrite, sur le fondement de l’exception tirée de « l’exécution intégrale du contrat » (Maud Asselain, Précisions sur le droit de renonciation aux contrats d'assurance conclus à distance, L'Essentiel Droit des assurances, 01 mars 2013 n° 3, P. 2).